• Mon frère le vent ...

     

     

    Il fait chaud. Le temps est lourd d'humidité.

    Mon frère le Vent, si tu venais fôlatrer tout doucement dans mon coin de pays, je serais bien contente.

    Quand tu veux, tu peux déplacer mer et monde. Je n'en demande pas tant cependant. Seulement une brise, un souffle léger qui chatouille les feuilles des arbres.

    Tu as le tempérament plutôt versatile, diraient certains. Je suis plus indulgente. Je préfère reconnaître que tu as une riche personnalité.

    Tu te fais poète et délicat comme tu n'hésites pas à grogner, à tempêter, à laisser éclater ta colère.

    Bien à l'abri, j'observe tes sautes d'hummeur. Tu bouscules tout et j'observe les réactions des arbres. Ils ne se laissent pas faire. lls réagissent, ils se défendent. Les roseaux plient sans se rompre. Mais parfois le grand érable craque et s'écrase de tout son long. C'est triste la mort d'un érable. Mais l'événement m'apprend que, même les grands sont soumis, comme les maigrichons et les faibles.

    Une colère venteuse peut en venir à bout. Je t'observe quand tu te déguises en légère brise.  Brise d'hiver qui fouette le visage et ravive le sang. Brise d'été qui caresse et apporte la fraîcheur.

    ll y a une musique de la brise. Quelque chose qui s'apparente à la danse, au menuet ou aux élans de certains ballets. Ces jours-là, je devine aux arabesques que tu joues du Mozart. Les arts de marient plus souvent que nous le pensons. Musique et danse font bon ménage. Les couleurs des impressionnistes deviennent facilement chanson. Toi, tu te fais orchestre et multimédias.

    J'aime surtout de toi le mystère. Tu apparais subitement, sans préavis. On ne sait pas d'où tu viens. On devine mal où tu vas. Tu passes simplement. Tu laisses quelques traces, imposantes ou discrètes. Puis tu disparais. J'observe ce jeu énigmatique.

     Tu me fais penser aux humains. Chacun, en se dévoilant, laisse entendre que ce qu'il cache est plus vaste que ce qu'il découvre.

    Quel paradoxe...Tu es invisible. Tu dois ta visibilité à la visibilité des autres. Cet arbre qui penche me dit que tu es là. Ces cheveux de femme dans les airs me laissent entendre que tu la courtises. Cet homme qui avance le corps plié me dit que tu bombes le torse et force l'autre à la lutte. Les autres me parlent de toi.

    Vent, mon frère, je viens de t'écrire une lettre un peu échevelée. car tu déteins un peu sur moi. . .

     


     

     

            





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